la naissance d’un projet
Comme beaucoup d’entre nous, j’ai longtemps cherché à vivre une vie plus alignée avec mes valeurs. Après la la naissance de ma fille aînée, j’ai pris des grandes décisions pour changer de vie, pour vivre une vie pleine de sens dans la ferme familiale de la Ville Es Renais.
Un début de parcours sans faute ?
J’ai grandi à Erquy, en Bretagne, dans une maison très accueillante et vivante. Petite, j’étais une enfant sage, rêveuse et idéaliste. J’ai tissé des liens très forts avec mes grands-parents avec qui je passaient une grande partie de mon temps libre. Ils ont tous été frustrés d’arrêter l’école au certificat d’étude pour aider à la ferme de leurs parents. J’ai donc bien travaillé à l’école jusqu’à obtenir un diplôme d’ingénieur en génie mécanique. Ce milieu majoritairement masculin a forgé mon caractère car j’avais toujours l’impression de devoir être meilleure que les hommes pour justifier ma place.
Pendant mes études, j’ai voyagé en Chine en sac à dos, j’ai travaillé un été à Londres, et j’ai étudié un semestre aux Etats-Unis, puis à Londres… J’ai saisi toutes ces opportunités incroyables, en sortant clairement de ma zone de confort et en savourant pleinement cette liberté.
J’ai ensuite travaillé 10 ans dans l’industrie métallurgique. A 26 ans, je donnais surement l’impression d’avoir réussi. J’avais une bonne reconnaissance professionnelle : je participais à l’amélioration des process de fabrication d’alternateurs de plusieurs tonnes. Deux ans plus tard, je dirigeais une équipe d’une cinquantaine de personnes dans un atelier de production. Dans cette usine, je contribuais à la production d’énergie – qui nous est presque aussi indispensable que la nourriture. J’avais l’impression de défendre la compétitivité de l’industrie « made in France ». J’étais libérée de cette enracinement à la terre qui était le quotidien de tous mes ancêtres paysans et cultivateurs.
Lors de la naissance de ma fille ainée, je réalise progressivement que le tableau est loin d’être idéal. J’élevais ma fille seule la semaine, avec de grandes amplitudes de garde, et quand je la récupérais, j’étais trop fatiguée pour m’en occuper. On n’a pour ainsi dire jamais réussi à trouver un rythme correct ni de nuits apaisées. Les week-ends, on s’évadait souvent chez des amis ou la famille, on voyageait. On cherchait surement des choses exceptionnelles à faire pour donner du sens à notre quotidien effréné. L’air de la mer et les moments simples dans la nature me manquait aussi !
Un rêve… comme un phare dans la tempête
Mes parents avaient déjà rénové un gite en 1995 à côté de notre maison familiale. Et si je pourrais rénover les autres bâtiments de la ferme ? Je pourrais développer une activité touristique. L’été 2014, je partage cette idée avec mes sœurs et mes parents. Je savais que le chemin serait long. En attendant le bon moment, j’étais déterminée à continuer à gagner en expérience et à apprendre. Je suis retournée travailler, à fond ! Mais j’avais cette fois une idée à laquelle me raccrocher : revenir vivre sur la terre de mes ancêtres, à Erquy pour créer mon entreprise.
Je rassemble une équipe
Je profite de mon congé maternité de mon deuxième enfant pour poser les jalons pour ce grand changement de vie. Épaulée de mes parents, je m’entoure petit à petit d’une équipe d’experts : architecte, juriste, notaire, comptable, conseillers tourisme… et même notre constructeur de cabane. Un pas après l’autre, j’élabore des scénarios et construis un projet faisable.
Malgré les premiers business plans et montage, le projet n’est pas assez mure. Mais le rythme de vie est encore plus soutenu et les nuits sont toujours hachées par les réveils des enfants. Je compte les jours. C’est dur, c’est long, la fatigue s’accumule… j’ai tellement peur de m’effondrer quand je ne serais plus obligée de « tenir le rythme ».
Enfin le retour à la Ville Es Renais !
Eté 2018, c’est le grand saut ! Mes parents ont presque fini de rénover leur nouvelle maison, mon conjoint a obtenu une mutation et on s’installe dans la grange. Je découvre le bonheur de pouvoir vivre des moments simples en famille : partager un petit déjeuner un matin d’école, prendre un gouter à la plage ou d’emprunter à vélo les nombreuses voies vertes autour de chez nous pour les trajets du quotidien. Je redécouvre le GR34 et tous les sentiers de randonnées du port de Daouhët au port à La Duc. On va être bien ici!
En parallèle, je relance tout le réseau d’expert pour affiner les statuts, les prévisionnels… J’apprends que la rénovation d’un gite à la Ville Es Renais n’est possible que pour un agriculteur. Quelle ironie ! Je prends conscience de cette dualité : celle de mon attachement profond à la terre et mon envie de m’en libérer.
Je serai agricultrice
J’accepte de relever ce challenge, avec une volonté profonde d’en faire un atout et de développer une complémentarité entre les activités agricoles et touristiques. J’évalue les différentes productions possibles, et quand je découvre le terme « osiericulture », ça m’interpelle. Je me rappelle alors de mon grand-père qui fabriquait dans grands paniers quand j’étais petite. Je serais donc osiericultrice.
La ferme reprend vie !
On a commencé par adapter des poules, puis progressivement, des moutons et des oies. Je rencontre une vannière et je recueille les expériences d’animateurs locaux. Je réapprends à travailler avec mes mains, et ça m’apaise. Je prends progressivement conscience des savoir-faire ancestraux, du cycle agraire, de la beauté de chaque saison. Je m’intéresse aussi aux fermes pédagogiques, avec l’idée de transmission aux enfants dans un contexte différent de l’école.
Une cabane perchée dans les arbres
La solidarité en Bretagne n’est pas une légende ! En tout cas,pour nous ça fonctionne et j’en suis très reconnaissante. La famille proche nous aide beaucoup, mais aussi les voisins et amis partagent facilement des conseils. C’est sur les conseils d’une voisine que je me rends au salon du tourisme à La Rochelle et je découvre un nid insolite en bois. Je suis sous le charme. Face aux restrictions des règles d’urbanisme, installer ce petit nid semble un très bons compromis… C’est cette cabane qui deviendra le premier logement insolite de La Ville Es Renais.
J’accueille mes premiers clients
L’été 2020, j’accueille mes premiers clients et je m’occupe de mes 3 enfants en parallèle. Nous sommes en pleine période Covid, et je me sens épuisée. Mais cette première année d’ouverture a tellement bien fonctionné, que cela me motive à continuer. Grâce au succès rencontré pour la première cabane, j’en ouvre une deuxième l’année suivante. Et je mets beaucoup d’énergie à veiller aux petites attentions qui font la différence auprès de mes clients.
Au fil des années, on aménage petit à petit les accès, des enclos grillagés et abris pour les moutons, on crée une nouvelle chambre d’hôtes dans le prolongement de notre maison familiale… Parfois je me décourage car je trouve que ça ne va pas assez vite, et pourtant, tous nos amis sont surpris de voir de nouvelles choses à chaque visite!
Aujourd’hui, je propose des séjours insolites à la ferme, dans une zone naturelle préservée, qui permet de découvrir le Grand site Cap d’Erquy – Cap Fréhel, hors des sentiers battus. L’ensemble de mon projet s’inscrit dans une démarche éco-responsable et propose une immersion à la ferme et des ateliers nature.
Je me sens épanouie et pleinement investie dans ma mission, celle de permettre à mes clients de couper de leur quotidien et de repartir ressourcés.
L’aventure continue
Après une dizaine d’année de réflexion et d’efforts, nous avons enfin obtenu le permis de construire pour aménager les anciens batiments de la ferme. Nous construisons pas à pas un petit village à la Ferme de la Ville Es Renais, avec de nouveaux hébergements, un espace bien-être et des salles d’activités. Je vous invite à nous suivre sur les réseau sociaux pour découvrir les travaux en cours et les prochaines nouveautés.
Retrouvez également mon portrait sur le site de Femme de Bretagne